Chapitre 1 : Le Destin s’invite à bord
Ethan Cross, milliardaire self-made-man, habitué aux jets privés et aux salons VIP, n’aurait jamais imaginé ce que ce vol en première classe allait déclencher. Il n’aimait pas les imprévus. Chaque minute de sa vie était planifiée. Chaque déplacement, mesuré, chronométré, maîtrisé.
Mais ce jour-là, une panne technique sur son jet personnel l’avait obligé à monter à bord d’un vol commercial vers Zurich. Le genre de chose qu’il n’avait pas faite depuis dix ans. Installé en 2A, concentré sur son discours pour le Sommet International des Investisseurs, il ne s’attendait à rien d’autre qu’un trajet calme et sans histoire.
Jusqu’à ce qu’elle entre.
Isabelle Laurent.
Elle. Celle qu’il avait aimée. Celle qui était partie. Celle dont il n’avait jamais compris le silence.
Et avec elle, deux petits garçons. Des jumeaux. Quatre ans, à peine. Des mini-lui. L’illusion parfaite, troublante, déroutante. Même regard sombre. Même fossette au menton. Même air farouche et doux à la fois.
Quand elle leva enfin les yeux vers lui, ses traits se figèrent.
— Ethan ? murmura-t-elle, la voix tremblante.
Il resta interdit.
— Isabelle… c’est bien toi ?
Elle hocha la tête. Les secondes devinrent éternelles. Le temps semblait suspendu dans cette cabine feutrée.
Puis il regarda à nouveau les enfants.
— Ce sont les miens, dit-il. Sa voix n’avait pas flanché. Ce n’était pas une question.
Elle inspira profondément.
— Oui.
Chapitre 2 : Cinq ans de silence
Le décollage se fit dans un silence pesant. Les moteurs vrombissaient, mais dans le cœur d’Ethan, un autre bruit grondait : celui du doute, de l’incompréhension, de la colère.
Comment avait-elle pu ?
Cinq ans. Cinq ans sans un mot. Cinq ans à croire qu’elle l’avait quitté pour de bon, sans raison. Et voilà qu’il découvrait, par hasard, dans un avion, qu’il était père de deux enfants.
Ses enfants.
Isabelle s’occupait des petits avec calme, mais ses mains tremblaient. Elle sentait son regard posé sur elle. Elle savait qu’elle ne pourrait pas fuir cette fois.
— Tu veux qu’on en parle ? murmura-t-elle enfin.
— Tu crois que j’ai le choix ?
Il avait parlé bas, mais le tranchant de sa voix ne laissait aucune place à l’illusion. Elle ferma les yeux un instant. Puis elle prit une inspiration, comme on saute dans le vide.
— Tu avais un empire à bâtir. Moi, une décision à prendre. À l’époque, j’ai cru que c’était la meilleure chose à faire…
— Me rayer de ta vie ? M’arracher mes enfants ?
Ses mots étaient calmes, mais chacun portait une douleur ancienne.
Elle le regarda dans les yeux.
— Je n’ai pas voulu t’empêcher d’être leur père. J’ai voulu les protéger.
Il eut un rire amer.
— Me protéger de moi, c’est ça ?
— Non. Les protéger d’un monde où tu n’avais plus de place pour autre chose que ton ambition. Tu étais obsédé par la réussite, Ethan. Tu ne dormais plus. Tu ne mangeais plus. Tu n’étais plus toi-même.
Il détourna le regard. C’était vrai. À cette époque, il ne vivait que pour ses chiffres, ses deals, ses levées de fonds.
— Et maintenant ? Qu’est-ce que tu veux que je fasse de cette vérité ? demanda-t-il.
Elle soupira.
— Je ne sais pas. Mais je ne pouvais pas te cacher ça plus longtemps.
Chapitre 3 : Deux visages et un miroir
Le vol dura deux heures. Deux heures où le passé, le présent, et un avenir incertain dansaient dans la tête d’Ethan.
Il observait les enfants. Ils s’appelaient Noah et Liam. Deux prénoms qu’il aurait pu choisir lui-même. Curieux, intelligents, vifs. Ils riaient doucement en jouant avec un petit avion en plastique. L’un avait peur du décollage, l’autre trouvait ça fascinant. Ethan remarqua que l’un tapotait du pied exactement comme lui, quand il réfléchissait.
Isabelle lui raconta ce qu’il avait manqué : les premiers pas, les premiers mots, les nuits sans sommeil, les maladies infantiles, les anniversaires.
— Tu as fait tout ça seule ?
— Pas seule. Avec eux. On a formé une équipe.
— Et moi, j’étais quoi ? Un souvenir ?
— Non… Tu étais une blessure.
Il ne répondit pas.
Les passagers dormaient ou lisaient. L’ambiance était feutrée. Un hublot laissait entrer la lumière du soleil couchant. Ethan s’y perdit un moment.
Puis, soudain, l’un des garçons — Noah — s’approcha de lui.
— Monsieur, pourquoi vous ressemblez à mon frère ?
Ethan resta interdit. Le garçon le fixait avec la candeur des enfants qui ne connaissent pas encore les filtres des adultes.
Il sourit faiblement.
— Parce que… je suis votre papa.
L’enfant le regarda un instant. Puis se tourna vers Isabelle.
— C’est vrai, maman ?
Elle hocha la tête, les yeux brillants.
Noah revint vers Ethan, hésita, puis grimpa sur ses genoux. Comme si c’était naturel. Comme si les années perdues n’avaient jamais existé.
— Tu sais conduire un avion ? demanda-t-il.
Ethan rit, malgré lui.
— Pas encore. Mais je peux apprendre, si tu veux.
Chapitre 4 : L’atterrissage
Lorsque l’avion entama sa descente vers Zurich, quelque chose en lui avait changé. Le milliardaire calculateur avait laissé place à l’homme. Au père. À l’amoureux peut-être encore blessé, mais pas brisé.
Les roues touchèrent la piste. Un choc léger, presque imperceptible.
— Et maintenant ? demanda-t-il.
Isabelle leva les yeux.
— Maintenant, je ne te cache plus rien.
Il posa une main sur celle d’Isabelle. Elle ne la retira pas.
— Laisse-moi apprendre à les connaître. Laisse-moi apprendre à te retrouver.
Elle acquiesça, les larmes aux yeux.
— On a du temps à rattraper.
Il sourit.
— Et du futur à construire.
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